Dévaluée ou surévaluée, la virginité perd son sens. Bien plus qu’un moment de la vie ou l’apanage des consacrés, elle concerne chacun, y compris ceux qui l’ont perdue. Mais est-elle vraiment perdue ?

« Par un côté de son être, l’épouse est la mère de demain, par un autre elle garde, non pas certes au sens physiologique mais au sens spirituel, un caractère virginal, elle le conserve en tant qu’épousée » (1), affirme Gertrude von Le Fort, femme de lettres allemande, amie d’Edith Stein.

Voilà une affirmation originale qui jette une nouvelle lumière sur la virginité. Elle bouleverse l’ordre chronologique qui veut que la vierge devienne épouse, puis l’épouse devienne mère, chaque réalité chassant la précédente. « C’est l’épousée qui représente le mystère propre de l’épouse. (1) » Et l’épousé, le mystère de l’époux.

Ainsi, en se mariant, les époux ne perdent pas leur virginité, ils lui (re)donnent tout son sens, celui d’un don total à une personne unique. « La femme reste une épousée toutes les fois qu’elle s’offre à l’amour de son mari. (1) » Et réciproquement. Les époux réactualisent toute leur vie le jour de leur mariage. À chaque fois se rejoue le mystère de la première fois.

La virginité, c’est le don et non l’absence de don

« Ce serait déformer le mystère dans le sens du naturalisme que de ne voir dans cette épousée que l’épouse encore vierge du jour des noces. (1) » Autrement dit, balayer la réalité de la virginité sous prétexte qu’elle n’est plus inscrite dans la chair est une erreur. Qui nous prive de l’élan du don contenu dans la virginité comme état d’esprit.

Une autre déformation naturaliste consiste à se déprécier ou à déprécier (même à l’intérieur d’un couple) celui ou celle qui n’a pas su garder sa virginité avant son mariage. Par le mariage, l’épouse et l’époux restaurent d’une certaine manière leur virginité en faisant un don total et exclusif d’eux-mêmes, en devenant l’épousé(e).

La virginité est donc une valeur de don et non pas d’absence de don. Ceux qui se consacrent à Dieu dans la virginité ne le font pas pour se conserver intacts, mais pour se donner entièrement eux aussi dans l’amour. C’est pourquoi la vocation au mariage et la vocation de se consacrer à Dieu s’éclairent mutuellement et se comprennent l’une par rapport à l’autre. Les consacrés ont besoin du mariage pour comprendre le caractère nuptial de leur vocation, comme les mariés ont besoin des consacrés pour comprendre le caractère virginal de la leur.

Garder ou perdre sa virginité ne sont donc pas des termes satisfaisants. Ils donnent une vision tronquée et de la virginité et de l’acte sexuel. Être vierge, c’est être l’épousé(e), celui/celle qui, dans sa joie d’être aimé(e), veut se consacrer à cet amour.

Sophie Lutz

(1) La Femme éternelle, par Gertrude von Le Fort, Cerf, p. 55.

Mariée, mère de quatre enfants, Sophie Lutz est auteur, chroniqueuse et conférencière. Ses sujets : le handicap, la souffrance, le couple et la sexualité.

 

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