Pas facile de rendre compte à nos jeunes du bien-fondé de la virginité jusqu’au mariage. Ils attendent notre parole, même s’ils ne le disent pas. Parce que, comme nous au même âge, ils ont envie de croire au bel amour.

J’ai posé la question à mon ado de 16 ans : « Pourquoi ne pas avoir de rapports sexuels avant le mariage ? » Réponse laconique : « Parce que ça se fait pas, c’est pas bien ». Moi : « Ce n’est pas un argument ! Il ne résistera pas longtemps quand tu seras amoureux ». J’entends intérieurement ma mère me dire : « n’en parle pas une fois, parles-en dix fois ». Effectivement, je me souviens être allé souvent lui demander de me réexpliquer, avoir fait l’avocat du diable pour vérifier que je pouvais croire ce qu’elle affirmait.

Pas facile pour des parents d’argumenter. D’abord parce qu’aucun parent ne voudrait décourager par un discours inaccessible, ni enfermer un jeune dans des éventuels ratés. Et puis, quand soi-même, on n’a pas attendu le mariage, on ne se sent pas légitime. Ou même, on n’y croit pas vraiment.

Il y a la raison théologique, sacramentelle, qui fait de la décision de la virginité jusqu’au mariage une question de foi. Le fait de croire que l’union de la chair valide la parole qui a été donnée, et qu’on ne peut séparer le verbe et la chair. « Le Verbe se fait chair. » Le Christ ne peut qu’être présent dans cette « « incarnation », qui dit quelque chose de l’amour qui est en Dieu. Très résumé.

Il y a la raison humaine, philosophique, de l’engagement. S’engager à moitié, est-ce vraiment s’engager ? L’amour humain n’est-il pas quelque chose d’assez grand pour mériter une promesse, qui dit ce qu’elle fait, et qui fait ce qu’elle dit. La personne que j’aime ne mérite-t-elle pas la sécurité d’un engagement à vie ?

Une question de plaisir ? Non. De bonheur.

Ces arguments s’entendent, s’ils s’accompagnent de réalisme. La virginité avant le mariage n’est pas l’ingrédient secret pour un premier rapport extraordinaire. Celui-ci est forcément maladroit, voire décevant sur le plan strict du plaisir. Ce qui rend beau ce moment, ce n’est pas d’abord la joie du corps, c’est la joie du cœur. Une joie « particulière », supplémentaire, quand ce premier rapport coïncide avec le mariage. Parce qu’alors, chacun offre à l’autre le bonheur d’avoir été choisi entièrement, et non pas « par morceaux » ou par « étapes ».

Une amie m’a confié qu’elle n’avait été convaincue ni par l’argument théologique ni par l’argument de l’engagement, mais par le regard pétillant de sa mère disant : « Ils ne savent pas ce qu’ils ratent ! » (ceux qui n’attendent pas le mariage). Ce qu’il est dommage de rater, ce n’est pas une extase physique, mais un bonheur « spécial ».

Sophie Lutz

Mariée, mère de 4 enfants, Sophie Lutz est auteur, chroniqueuse et conférencière. Ses sujets : le handicap, la souffrance, le couple et la sexualité.

 

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