La fatigue rend-elle les relations sexuelles improbables ? Les fatiguées chroniques ne sont pas condamnées à considérer « ça » comme une corvée. « Sur une échelle de 0 à 10, ma chérie, tu es crevée comment ? » À l’heure des ébats amoureux, l’excuse de la migraine n’étant plus crédible et ne l’ayant peut-être jamais été, elle est couramment remplacée par celle de la fatigue, lot quotidien de bien des femmes quand la journée se termine. Difficile alors de trouver l’énergie de donner encore de soi dans une union sexuelle.
Étonnante différence des sexes qui fait que, là où l’homme se repose, se rétablit, se répare, la femme a peur de s’épuiser. Il est vrai que statistiquement et physiologiquement, la femme a un plus grand besoin de sommeil. D’où l’inventivité de certains couples pour choisir un moment favorable. Pas simple.
Faut-il se résigner ? La vie est-elle si mal faite ? Les relations conjugales sont-elles inévitablement un sujet de culpabilité (« Je n’y arrive pas ») ou de frustration (« Je n’ai pas assez ») ?
Ne pas se mettre de pression
Fatigue et union conjugale ne sont pas forcément incompatibles… à quelques conditions :
– un changement d’état d’esprit : cesser de considérer l’acte sexuel comme une fatigue supplémentaire et commencer à le voir comme un ressourcement possible et un réconfort physique;
– une absence de pression : on peut s’arrêter à tout moment, si c’est trop difficile. Même si la fatigue ne doit pas annuler tout projet d’union, elle doit être réellement prise en compte. Être reconnue et comprise dans cette impression de ne plus pouvoir rien donner, d’être à bout, permet à la femme de se sentir respectée et aimée, et peut-être de se détendre pour s’ouvrir au corps de son mari ; et si elle ne peut pas, de le vivre sans culpabilisation ;
– un massage chaleureux des pieds, des jambes, du dos, qui a le double avantage d’être délassant et d’être un préliminaire pas trop envahissant et direct ;
– un positionnement des corps le moins coûteux possible en efforts ;
– une sorte de détachement : ne pas avoir d’idées ou d’attentes préconçues sur le déroulement de l’union. Pourquoi pas une union qui ne va pas jusqu’à l’orgasme ? Ce dernier n’est pas un impératif absolu, pour l’un comme pour l’autre ;
– de la générosité de part et d’autre, et l’absence de tout soupçon sur cette générosité.
En résumé, une union plutôt sur le mode tendre que sur le mode passionné. Cette union « dans la faiblesse » est souvent récompensée d’un sentiment de communion plus grand, une gratitude mutuelle qui fortifie l’amour.
Sophie Lutz, mariée, mère de quatre enfants, Sophie Lutz est auteur, chroniqueuse et conférencière. Ses sujets : le handicap, la souffrance, le couple et la sexualité.